Je reviens aujourd’hui sur une de mes plus belles expériences de course : le trail que j’ai couru en Alsace le 5 juin dernier. Vous le savez certainement, j’ai commencé la course à pied comme beaucoup en courant sur la route ou sur des chemins aménagés. J’ai fait mes premières armes et mes premières compétitions sur le bitume mais, au fur et à mesure que je progressais, j’ai commencé à caresser l’idée d’aller promener mes baskets sur des sentiers plus naturels. Eh oui, je suis avant tout une passionnée de nature (et particulièrement de montagne) alors j’ai tout de suite vu dans le trail une discipline idéale combinant mon amour pour la course à pied et les beaux paysages.
C’est l’année dernière que j’ai commencé à m’intéresser vraiment au trail. Un peu de loin, je l’avoue, car c’est un sport qui est très exigeant et qui nécessite une bonne implication. J’ai quand même participé à ma première course en format « découverte » il y a un an, un trail de 13 kilomètres dans les chemins forestiers, avec un dénivelé facile. J’ai adoré ! Par la suite, je me suis attaquée à quelques courts parcours de trail en montagne lors de mes dernières vacances en Haute-Savoie mais je n’avais pas encore le niveau nécessaire pour bien en profiter.
Et puis les mois ont passé, la saison froide est arrivée et je suis retournée à des objectifs plus classiques (progresser sur semi-marathon et 10 kilomètres !) Jusqu’à ce que mon chéri me lance un défi : participer avec lui au trail du Taennchel, en Alsace. Un vrai de vrai, avec du dénivelé. En prenant connaissance des différentes épreuves, j’ai été tentée pendant quelque temps de m’inscrire à la plus courte, un 11 kilomètres (mais avec déjà plus de 500 m de D+). Et puis finalement, sur un coup de folie, j’ai choisi la difficulté : l’épreuve de 22,5 kilomètres avec 1082 m de dénivelé. Oups.
Nous nous sommes entraînés avec Guillaume comme nous l’avons pu, en composant au mieux avec notre région (assez plate !), la météo (pas besoin de revenir dessus je crois… on n’est pas passés loin des inondations !) et notre emploi du temps personnel bien chargé. La préparation au trail n’aura clairement pas été optimale pour ma part mais m’aura quand même permis de progresser un peu et de renforcer mollets et quadriceps.
La veille de l’épreuve, nous n’étions donc pas très sereins avec Guillaume : nous n’avions jamais couru une telle distance et nous avions rencontré au maximum 400 m de dénivelé positif lors de nos entraînements. Autant dire : bien loin de ce qui nous attendait ! Pour ces raisons, je n’ai pas voulu me fixer d’objectif particulier, si ce n’est de finir l’épreuve (ce qui serait déjà une victoire en soi). Avec mes petits calculs et un œil jeté aux résultats de l’année dernière, j’espérais quand même m’approcher de la barre des 3h30.
Le jour J, nous avons récupéré nos dossards (et la bouteille de crémant offerte !) L’ambiance et le décor sont bien différents des courses sur route : les coureurs sont en moyenne plus âgés, super équipés, très musclés… et il y a bien plus d’hommes que de femmes. Néanmoins, je trouve les participants plutôt détendus, les bénévoles adorables et l’esprit sportif. Je me demande bien à quelle sauce je vais être mangée et je me dis que je fais bien pâle figure face à tous ces trailers aguerris !
Le départ est donné en milieu de matinée. Je me place volontairement tout derrière et je franchis l’arche de départ tranquillement. Pas la peine d’user ses forces prématurément… Je prends donc un rythme facile, à environ 6’10/km pour les premiers 500 mètres en faux-plat, en remontant la ville de Ribeauvillé. Il fait déjà chaud et j’ai un petit moment de panique en me demandant comment je vais gérer cela. Puis je me rappelle que j’ai 500 mL d’eau sur le dos et que je ne devrais pas mourir de déshydratation.
Nous quittons rapidement la route pour pénétrer dans la forêt et attaquer les vraies difficultés. Très rapidement, nous attaquons une grosse montée, qui durera quand même 5 kilomètres. Je sens déjà mes quadriceps qui me brûlent et je me demande pourquoi je me suis embarquée dans un truc pareil. J’alterne course et marche rapide en essayant d’adopter un rythme assez soutenu quand même. Le cardio monte et la respiration s’accélère mais pour l’instant, je suis super déterminée. Je dois même dire que je m’amuse bien, malgré les difficultés !
Je colle devant moi un monsieur plus tout jeune en orange et nous nous tirons mutuellement vers le haut. Je le dépasse, il me dépasse… et ainsi de suite. Devant nous, les meilleurs galopent, mais je sais que je suis loin d’être la dernière alors ça me rassure. Autour de nous, le paysage est très beau. On retrouve un peu de fraîcheur dans les sous-bois et la chaleur est en fait beaucoup plus supportable que je le pensais. C’est dur, mais ce n’est pas un sprint, alors je m’économise et je bois très, très régulièrement.
Au 2,5 ème kilomètre, une petite descente me permet de souffler et d’accélérer nettement. Cela fait du bien au moral de retrouver une allure rapide après avoir fait la tortue. Mais cela ne dure pas, rapidement il faut de nouveau monter, monter… sans apercevoir le moindre sommet. Qu’est-ce que ça grimpe ! J’ai parfois l’impression de faire du surplace. Je cours sans trop difficultés en pente douce mais dès que le dénivelé est trop important, je me tiens les cuisses pour arriver à faire décoller mes pattes du sol !
Je commence à me sentir un peu faiblarde à l’approche du cinquième kilomètre : cela tombe bien, un ravitaillement est prévu. Je ne savais pas à quoi m’attendre mais ce fut une très belle surprise : tout est super propre, bien disposé, il y a le choix (fruits, bonbons, pain d’épice, eau plate, citronnade…). Je m’arrête un petite minute pour boire deux verres d’eau fraîche, croquer dans un bonbon et emporter avec moi du pain d’épice. Je suis complètement requinquée et prête à attaquer la première vraie descente (enfin !)
Je donne tout et saute comme un petit lapin entre les branches et les cailloux. Les passages sont très étroits mais j’arrive quand même à doubler pas mal de monde. Je suis contente de constater que mes jambes ne sont pas encore trop éprouvées par les montées et qu’elles peuvent courir à 5′ au km. Mais malheureusement, cela ne dure pas et il faut ré-attaquer les montées. Je me fais à nouveau dépasser par quelques personnes et je retrouve mon papy avec lequel je fais un bout de chemin.
Tout va bien jusqu’au dixième kilomètre. Je suis même plutôt contente de moi et de mon chrono jusque là. Mais je ne suis même pas à la moitié et il me reste encore du boulot. Nous attaquons une des montées les plus difficiles, très raide, et je ne suis pas au niveau des autres trailers qui m’entourent. Je discute un peu avec le monsieur en orange (qui me dit que dis donc, les trails sont de plus en plus difficiles !) mais celui-ci grimpe plus vite que moi et je le laisse filer. En même temps, je n’arrive pas à me hisser plus vite. J’ai franchement mal aux cuisses et je commence à avoir trop chaud.
Là, je me rends compte de mon erreur : je n’ai pas rechargé mon camelback en eau alors que le ravitaillement suivant est loin. Je ne sais pas du coup ce qui me reste comme quantité d’eau et j’ai peur d’en manquer. J’essaie de ne pas trop boire mais c’est difficile avec la chaleur… Je vois mon papy au loin alors je m’accroche. Les pentes sont moins raides donc je me remets à courir, en alternant quand même avec de la marche car mes cuisses ont déjà bien encaissé !
Progressivement, je me rapproche du 13 ème kilomètre (et donc, du ravitaillement). Jusqu’à apercevoir le stand en contre-bas : une belle descente va me permettre de le rejoindre. A ce moment là, je suis complètement toute seule dans la nature. Le chemin débouche sur un panorama incroyable et je profite de chaque seconde. A mesure que je dévale la pente, je ressens une grosse bouffée d’émotion et de plaisir. Je pense à Guillaume qui se situe quelques kilomètres plus loin. Je me dis que j’ai fait plus de la moitié du parcours et que je me sens capable de continuer !
Au ravitaillement, je bois presque 3 verres d’eau tant j’avais soif. Je recharge mon camelback mais gros problème au moment de refermer la glissière qui tient ma poche à eau. Impossible de la fermer ! Je perds de précieuses minutes… et même le bénévole n’arrive pas à m’aider. Mon papy orange s’éloigne au loin… Un peu dépitée, je remets le tout dans le sac à moitié fermé en espérant ne pas me faire inonder… Au même moment, les premiers de la boucle de 33 kilomètres me rejoignent. J’observe (et j’admire !) leur foulée et leur puissance mais je dois dire que me faire dépasser par des dizaines de coureurs n’est pas très agréable pour le moral. L’un d’eux me félicite au passage, c’est chouette cet esprit trail !
Il faut encore monter jusqu’au 16 ème kilomètre environ. Les chemins sont moins pratiqués et je me balade entre branchages et orties, sur de tous petits sentiers. Malgré tout, je trouve le parcours super joli et cela détourne un peu mon attention de mes cuisses qui sont gentiment en train d’exploser. De toute façon, à ce moment, le trail, c’est dans la tête ! Et je suis toujours super motivée et déterminée.
Enfin, la longue descente finale se profile au loin. Il y a encore de nombreux petits passages en montée mais globalement, le parcours devient plus facile et roulant. Mes jambes, par contre, ne sont plus celles d’un petit lapin qui galope. Je sais très bien que j’ai des ampoules aux doigts de pied donc j’adapte mon allure. Mes genoux aussi commencent à manifester de petites douleurs. Rien d’insurmontable, mais je déroule prudemment pour ne pas me blesser. Au dernier ravitaillement, vers le 17ème kilomètre, je ne m’arrête presque pas. Juste le temps de boire et d’emporter un bout de gâteau. Il est temps de le finir, ce trail !
Un peu plus loin, vers le 18-19 ème kilomètre environ je croise tous les trailers d’une association contre le handicap, qui font tout le parcours de 22 kilomètres en poussant et en tirant des enfants malades dans des sortes de chariots. C’est complètement fou ! Je suis super impressionnée et émue de leur action, surtout étant donné la difficulté du trail et les chemins escarpés… Quelle belle initiative ! Bon, j’ai manqué de tomber deux fois en essayant de les doubler sur les petits sentiers boueux, par contre.
De nouveau, en sentant l’arrivée proche, je ressens une vague d’émotion. Je vais le finir ce trail, c’est certain maintenant ! Il ne me reste plus que quelques petits kilomètres à parcourir… D’ailleurs, c’est la fin de la partie en forêt et la fin des chemins. Je rejoins la route, au milieu des vignes… mais aussi en plein soleil. C’est le tout début de l’après-midi et celui-ci tape dangereusement. Malheureusement, même là, le parcours est loin d’être plat. Il y a quelques faux-plats qui s’enchaînent et qui font mal après plus de 20 kilomètres difficiles.
A ce moment, j’entre dans une bulle, en mode « pilote automatique ». Je pense simplement à mettre un pied devant l’autre et à ne pas marcher. Mon allure n’est pas si mauvaise après plus de 3 heures de course. Je ne suis pas essoufflée, simplement endolorie et fatiguée. J’aperçois Guillaume qui me rejoint vers le 21 ème kilomètre. Lui a déjà fini sa course et revient sur ses pas pour m’encourager. Il me dit qu’il est super fier de moi et qu’il ne pensait vraiment pas me trouver là si tôt. Cela me rassure et me donne la force nécessaire de continuer. Par contre, je lui demande de ne pas me parler, de ne pas me pousser. C’est MON trail, MA course, je la terminerai à ma façon.
Enfin, je vois l’arche d’arrivée. Comment décrire cette sensation incroyable, lorsque l’on sait que les difficultés se terminent ? Je n’arrive pas à contenir mon émotion : je pleure et je souris en même temps, tellement je suis émue. Finisher en 3h21 (environ) ! Je suis heureuse, fière en même temps… mais aussi affamée et courbaturée comme jamais donc je file reprendre des forces au ravitaillement final.
Au bilan, cette course a été incroyable. Je suis véritablement allée chercher au fond de moi. Le trail, c’est magique ! Cela t’en apprend tellement sur toi-même… Cette course a été la plus éprouvante que j’aie jamais courue (enfin, si on oublie les 10 km de Soissons hihi) mais aussi la plus belle, assurément. Grâce à elle, je n’ai plus peur de m’inscrire à un marathon. Je n’ai plus peur non plus de relever des défis ambitieux. Je sais qu’avec mes petites jambes de tortue et ma tête, on peut aller loin… Et j’ai hâte de renouveler l’expérience !
Myrtilla
Wohouu !!! T’en as du courage, vraiment ! J’ai adoré lire et suivre ton récit ! Comment tu fais pour te rappeler de tout ça ?? ^^ Et sinon j’ai une petite question, tu l’as trouvé où ton gilet porte boisson et porte choses que tu as sur toi ? Il est hyper pratique ! 🙂
Bisous !!
Rhapsody in Green
Oh, c’est gentil ! Je ne me rappelle pas de chaque portion du parcours précisément mais j’ai quand même de bons souvenirs de la course 😉 Et si jamais j’ai un doute je regarde ma montre qui enregistre mon allure et le parcours par kilomètre, ça aide pour situer les difficultés dans le temps.
Sinon mon camelback est effectivement super pratique ! Je l’ai trouvé dans un magasin qui vend des affaires de montagne (Lafuma). Il y avait des soldes, ça aide ! Il y a plein de modèles mais je te conseille de bien essayer car certains sont un peu grands pour les femmes je trouve. Bisous !
Myrtilla
Je ne connais pas Lafuma ! Mais j’irai voir si vers chez moi il y a un magasin qui vend un article similaire 🙂 Bisous !
Superfici'Elle
Quelle belle expérience! J’ai été très émue de lire le passage sur les gens qui accompagnent des enfants handicapés. C’est magnifique!
Ton récit d’expérience est très chouette également. Comme toujours je suis admirative…. Tu me motive à chaque article, même si pour le moment, je n’arrive pas à trouver le temps de retourner courir. Mais en juillet, ça devrait aller mieux!!
Bravo pour ce super trail et pour avoir tenu le coup!!
Rhapsody in Green
Merci de ton commentaire ça me touche beaucoup. Je suis contente d’avoir pu retranscrire un peu de l’émotion que j’ai ressentie pendant la course. J’espère que tu auras bientôt plus de temps libre pour faire des choses qui te plaisent (et courir aussi hihi). Bises
The MarSienne
Tu as vraiment un talent fou pour raconter tes expériences de courses. Je lis tes paroles comme je lirais un livre d’aventure 😉 En effet, à travers tes écrits, j’ai l’impression de vivre ta course avec toi!!!
C’est vraiment une belle expérience, tu as maintenant mérité de reposer tes genoux 🙂
Je suis encore loin de tes performances car j’avance petit à petit (j’ai enfin dépassé les 6 km ce weekend) mais cela m’encourage pour la suite car je pense que le trail doit être une très belle expérience à vivre pour moi qui adore aussi la nature et une grande fierté.
Rhapsody in Green
Merci ça me fait trop plaisir ! Mes petits genoux tirent encore un peu la tête malheureusement, j’espère que je vais vite pouvoir les remettre sur les rails. Bravo pour tes progrès en tous cas, 6 km c’est déjà top ! Je suis sûre que le trail pourrait te plaire en tous cas, c’est vraiment un très joli monde 🙂
Hollyvia
Bravo pour ce trail et quel magnifique récit !
Encore une fois, tu me donnes envie de me lancer dans le trail… je vais regarder ça de plus près pour la rentrée !
Rhapsody in Green
Je lirai tes aventures trailesques sur ton blog alors 😉
merci pour ton petit mot !
Elise
Super compte rendu ! 🙂 Bravo pour ta course !! (Effectivement le marathon n’est pas si loin)